Début septembre 2025, l’organisation ESS France a publié un document évaluant le rôle de l’économie sociale et solidaire (ESS) dans la transition écologique en France. Ce dossier d’une centaine de page s’aligne sur les scénarios de neutralité carbone pour 2050 de l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME).
Vers la neutralité carbone
Dans un contexte où les scientifiques du GIEC appellent les Etats à agir urgemment pour le climat, l’ADEME a élaboré quatre scénarios pour parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050. Ces plans promeuvent des nouveaux types de société, intégrant pleinement des caractéristiques sociales et environnementales.
- Le scénario 1, Génération Frugale, promeut une transformation radicale des modes de consommation. Ici, il est question de réduction de notre consommation, d’une relocalisation des activités, et d’une stricte préservation de la nature. La transition doit être la plus équitable possible avec fort ancrage territorial.
- Le scénario 2, Coopérations Territoriales, est un processus plus progressif ayant un certain focus sur la sobriété et l’efficacité énergétique. Grâce à des incitations, le développement des circuits courts, une économie du partage et une gouvernance locale renforcée, ce modèle tend à créer une meilleure cohésion sociale.
- Dans le scénario 3, Technologies Vertes, la priorité est donnée à l’innovation technologique pour décarboner l’économie. Les changements quant aux modes de vie sont moins marqués. La régulation est assez faible. Le modèle est toujours basé sur une logique marchande mondialisée. Il s’agit surtout d’un “consumérisme vert” accessible principalement aux plus riches.
- Enfin, le quatrième scénario, Pari Réparateur, repose sur une logique de continuité. De fait, les modes de vie sont maintenus. Il y a là l’idée que les technologies futures pourront réparer tous les dégâts écologiques et sociaux. Cette logique de dépendance expose ce modèle à des risques importants.
En ce sens, l’ESS incarne une réponse cohérente pour la mise en œuvre des deux premiers scénarios. Ces derniers partagent une vision décentralisée et inclusive de la transition écologique, mettant en avant la sobriété, la gouvernance locale et la justice sociale, éléments ardemment défendus par les organisations de l’ESS. Il n’est pas seulement question d’une convergence des valeurs mais d’une condition essentielle à la réussite de ces trajectoires.
Faire de l’ESS un élément essentiel de la transition écologique
Portées par des organisations ancrées localement, un passage de l’ESS au niveau national est souvent synonyme de contraintes. En effet, le manque de reconnaissance par les investisseurs traditionnels et les décideurs publics limite sa légitimité et son développement. A cela s’ajoute un manque de financements et d’investissements qui empêchent la consolidation des structures et une relocalisation de l’économie. Aujourd’hui, le secteur est aussi concurrencé par une augmentation d’acteurs lucratifs sur des marchés clés comme le réemploi ou les énergies renouvelables.
Ainsi, pour dépasser ces limites, le rapport d’ESS France réclame des politiques publiques ambitieuses, cherchant à adapter les mécanismes de financement, garantir un accès sécurisé aux ressources et renforcer les capacités d’action des acteurs de l’ESS.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que les acteurs de l’ESS se voient souvent exclus des instances de gouvernance et de planification écologique, alors même qu’ils proposent des projets innovants et alignés avec les objectifs de transition écologique.
Pour faire de l’ESS un pilier central des trajectoires de transition, il faut lui donner les moyens de changer d’échelle, de passer du niveau local au national, sans renier ses principes fondamentaux pour assurer une transformation sociétale qui soit juste, démocratique et inclusive.